L'hypno-systémique : suspense en Allemagne


Par Gisela DREYER
Nous n’en finirons pas d’être surpris (enrichis !) par les particularités de l’hypnose allemande. Alors qu’en France, la systémie connaît une certaine crise dont on peut se demander si elle n’est pas en rapport avec le peu d’intérêt des systémiciens pour l’hypnose, nos collègues allemands adhèrent majoritairement à une vision qui conjugue pleinement ces deux regards qui s’affinent même mutuellement dans une créativité souvent inattendue...


La notion d’« hypno-systémique » réunit les conceptions de la thérapie systémique et celles de l’hypnose éricksonienne. Au cours des années 1970, l’équipe de Heidelberg (Helm Stierlin et Gunther Schmidt) a développé, en étroite coopération avec le groupe de Milan (Selvini, Boscolo, Cecchin, Prata), l’approche « systémique constructiviste ».
L’idée de base consiste à rappeler que les pensées, les émotions et les comportements de l’être humain s’opèrent toujours en rapport avec d’autres, dans leur contexte écologique. L’unité de base est la totalité du système dans lequel l’individu est intégré, unité qui englobe l’organisme ainsi que son entourage biosocial et physique. La pensée systémique souligne moins les caractéristiques de l’individu que celles des interactions qui garantissent la cohésion du système vivant qui suit des règles inhérentes se reproduisant en permanence, de lui-même, créant à chaque instant ses propres réalités.

Jamais une description ne peut être une reproduction exacte de ce qui « existe réellement » ; elle apparaît par la focalisation de l’attention à travers les cinq sens (VAKOG). Cette approche s’inscrit dans le courant de la maxime constructiviste de Maturana et Varela (1982) suivant laquelle « la réalité est une construction consensuelle qui apparaît comme si elle existait “objectivement” ». C’est la théorie de l’autopoïèse développée dans le prolongement de Bateson et de Wittgenstein. Chaque individu développe au
cours de sa vie ses propres structures de perception et d’intégration du vécu, ainsi qu’un propre mode de fonctionnement biologique du cerveau par systèmes fermés.
Milton Erickson – mort en 1980 – s’est déjà, au cours des années 1930, orienté vers ces concepts qui sont confirmés parles recherches actuelles en neurologie. A
la différence des systèmes humains, les systèmes purement biologiques ont une fin en soi et ne peuvent pas être simplement transférés.

La pensée systémique, comme celle de l’hypnose, partage une vision identique sur la manière dont des changements interviennent. Le vécu de l’individu est expression des représentations (schémas, patrons) engendrées au cours de la vie, constituant des réseaux d’associations au niveau neurologique en permanente réassociation. Un changement intervient par la création de différences. Evénements et symptômes sont le résultat d’actions et d’interactions. Une vision purement psychique est forcément réductrice. Pour réaliser des transformations, il n’est nullement nécessaire de modifier un réseau entier, il suffit d’introduire de petites disparités au niveau des enchaînements pour provoquer une transformation de l’ensemble du système,puisque tout réseau est en permanente interaction (tache d’huile).

Gunther Schmidt écrit dans une de ses publications : « Au retour de ma visite chez Milton Erickson peu avant sa mort, je me suis efforcé en priorité de relier les conceptions
systémiques - constructivistes si précieuses avec les modèles éricksoniens. Cela m’a amené à créer l’appellation d‘hypnosystémique, puisque les deux approches
présentent de nombreux parallèles, aussi bien au niveau théorique qu’au niveau des stratégies d’action (méthodes). Leur intégration a encouragé à la révision d’un certain
nombre de positionnements des deux concepts. Mon séjour chez Erickson a fondamentalement changé ma propre manièrede penser et d’agir, comme d’ailleurs celle du monde systémique en Allemagne. »

Y A-T-IL UNE RÉALITÉ ? TOUT EST PERCEPTION

Le « Je perçois ! » ne peut pas être une image photographique de ce qui « est », mais un acte créateur autonome et autoorganisé.C’est le résultat d’un choix parmi diverses stimulations de ce que l’on appelle la « perception ». Nous sommes intégrés dans un jeu dialectique de changements permanents (comme dans une danse) que nous concevons de manièreautonome, sans toutefois être complètement indépendants. Au sein de la mémoire,la mulébreux « passés » et de nombreux « avenirs ». Nous réactivons ces réseaux suivant les sollicitations de l’instant (par exemple, musique, odeur, mimiques, etc.) qui sont pour une grande partie in-conscientes. Par une intervention hypnosystémique, elles sont rendus conscientes en dégageant émotions, souvenirs, réactions corporelles, explications, jugements de valeur, attentes, métaphores, etc. Nous
créons en permanence notre perception par nos pensées et imaginations, en activant ces réseaux qui produisent la « réalité» dominante accompagnée d’une réaction au niveau du corps (des muscles,des hormones, de la tension artérielle, de la respiration, du pouls, de la coordination, etc.), et présumons souvent qu’elle est le produit de forces extérieures ou d’impulsions intérieures incontrôlables. Pour maîtriser cette complexité, nous inventons des catégories qui souvent s’avèrent restrictives ou même répressives
(diagnostics).

DIALECTIQUE HYPNO-SYSTÉMIQUE

Affirmer que toute transformation au niveau individuel – qu’elle soit intentionnelle ou non – ait des répercussions surle système social (couple, famille, entreprise…) est une banalité. Ceci est vrai aussi bien à propos des changements concernant les symptômes que pour l’introduction de (nouvelles) ressources. Vivant un problème, l’individu se sent affaibli, diminué, vieilli (etc.), ne correspondant plus aux désirs de son entourage. Il se peut pour -tant que le « problème » soit une preuve, par exemple, de loyauté, d’honnêteté ou de fidélité. Les problèmes s’avèrent donc comme des tentatives de solution dans des situations de porte-à-faux. On pourrait même affirmer que « les problèmes sont des solutions » (Klaus Mücke). Souffrir d’un symptôme est vécu comme une expérience négative, comme signe d’une incompétence ou d’un déficit à effacer,
à faire disparaître. De telles réactions s’avèrent particulièrement résistantes à la transformation souhaitée. L’idée qu’elles peuvent avoir un contenu raisonnable,même judicieux, ou être un soutien, apparaît dans l’immédiat souvent comme erroné et/ou aberrant.

Gisela DREYER - Psychologue clinicienne en cabinet privé à Bonn en Allemagne. Correspondante de la revue Internationale « HYPNOSE &Thérapies Brèves ».


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Edito : Erickson en Ile-de-France. Dr Thierry Servillat
La vogue de l’hypnose est actuellement réelle dans les pays européens francophones. En anesthésie d’abord, et dans bien d’autres champs bien sûr. Et c’est l’approche éricksonienne qui est la plus diffusée et enseignée, même si d’autres orientations (hypnoanalyse, hypnose cognitive comportementale, hypnose énergétique d’inspiration asiatique, etc.) ont aussi une place notable. Cette « hypnodiversité » apporte une multitude d’outils, un véritable foisonnement qui justifie la création d’une nouvelle rubrique dans notre revue.

Hypnose de la douleur. L'art du son en pratique facile. Stéphane OTTIN PECCHIO
Il paraît que ceux qui savent faire de l’hypnose de la douleur peuvent tout faire en hypnose. La tâche est en effet difficile, alors peut-on se priver de l’aide du son ? Lorsqu’il y a trois ans j’ai pris un poste au Centre d’évaluation et de traitement de la douleur (CETD) de l’hôpital Tenon à Paris, une question pratique s’est posée : quel instrument de musique choisir pour accompagner mes séances d’hypnose dans une salle de consultation polyvalente ?


Hypnothérapie des stress post viols sous stupéfiants. Gérald Brassine
Sortir de l'emprise chimique. Concepteur de la Psychothérapie du Trauma Réassociative (PTR), Gérald Brassine partage sa longue expérience hypnothérapique des patients abusés sexuellement avec usage de stupéfiants. L’observateur inexpérimenté dans le traitement des traumas pourrait à juste titre s’interroger sur le fait qu’une personne ayant vécu une agression sexuelle en état de totale inconscience, puisse présenter ou non les symptômes habituellement rencontrés dans les cas d’Etats de stress post-traumatiques (ESPT). Pourtant, que le patient (ou la patiente) soit totalement inconscient d’avoir été un jour victime d’une telle agression ou qu’il (ou elle) n’ait que quelques souvenirs de l’avant et de l’après agression, la présence des symptômes du psycho-trauma est frappante.

Parkinson/ Erickson, ça rime ! Laurent BUJON
Infirmier très doué, Laurent Bujon reprend ici un précédent article pour développer son expérience mûrie durant plusieurs années de prise en charge de patients souffrant de maladie de Parkinson. Ma première rencontre avec l’hypnose date d’une dizaine d’années, en salle de réveil où j’étais infirmier intérimaire. Je fus très surpris par le comportement des patients bénéficiant de cette approche : plus calmes, peu algiques, avec des constantes régulières pour la plupart. Et surtout: la «levée » d’anesthésie était plus douce. J’ai aussi travaillé en SMUR et services.


Hypno-philo : Possibilité de l'amour. Dr Thierry Servillat
L’importance du dernier livre de Robert Misrahi pour nous, soignants, thérapeutes, aidants, est telle que nous nous devons de revenir vers l’œuvre de ce philosophe peu médiatique, voire discret. Car il s’agit d’un ouvrage de philosophie très concrète, qui se préoccupe assez directement de santé puisqu’il s’occupe d’une manière assez nouvelle d’envisager la vie de couple où la joie est possible à l’intérieur d’une relation d’amour réussie.


"Sauf votre respect". Dr Stefano COLOMBO
Sauf votre respect, le lecteur est un imbécile ! Imaginez, un instant, qu’un article, un roman ou un quiproquo commence ainsi. Vous allez sur-le-champ refuser de continuer la lecture et chercher l’adresse de la rédaction pour lui écrire toute votre colère. Peut-être. Peut-être ? Sûrement, affirmez-vous. Pas si sûr. Pas si sûr ? Vous allez voir. Vous n’allez quand même pas croire que moi, lecteur, je me laisse traiter d’imbécile à la légère.


Joyce C. Mills : Histoires à grandir. Christine GUILLOUX
Paris. Place de la Sorbonne. Place de la Nation. Quai Saint-Augustin. Le garçon de café plaisante avec Joyce, l’assiette arrive riche de couleurs et de saveurs en un agencement ô combien esthétique, le repas se partage longuement, sans qu’il soit question d’y mettre une limite, avec l’autre ou les autres et c’est goût de bonheur. Joyce pétille et s’émerveille. Paris, ville magique, porteuse de la France, riante de beautés autant que de créativités, de subtilités et d’art de vivre.

Autour des « classes de maître ». Gaston Brosseau
Griffées Dior, Yves Saint-Laurent ou Versace. Ne vous fiez pas au titre de ce texte, il fallait bien lui donner un petit accent accrocheur ! En fait, je vais parler pour ma paroisse, beaucoup même, et relater mon expérience de formateur invité à donner des classes de maître, d’une journée, de deux jours, de trois jours et même de cinq jours consécutifs en France et au Québec. D’abord, si vous êtes du groupe des formateurs invités, c’est que vous êtes probablement dans la profession depuis belle lurette.


La feuille blanche. Dr Marc Galy
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Je suis né un dimanche soir juste à la fin de la kermesse de l’école du village. Est-ce de là que me vient le goût des fêtes, des rassemblements, de ces jours spéciaux hors du quotidien, de l’ordinaire que chacun vit chez soi à sa manière, à son rythme ? Je ne sais pas, mais j’ai gardé beaucoup de souvenirs du pardon, fêtes du Saint Patron où tout le monde se retrouve à l’église puis aux manèges et stands des forains ambulants, du 14 juillet, fête nationale, où après les courses en sac ou à la cuillère, après les concours de vélos fleuris pour les enfants, tout le monde se trouve sur la place pour danser au son de l’accordéon.



- Hypnothérapeute à Paris - Formateur en Hypnose Médicale, Ericksonienne et EMDR - IMO,… En savoir plus sur cet auteur

Rédigé le 22 Février 2018 à 14:24 | Lu 2142 fois